Né en 1985, Wells Chandler est un artiste originaire du sud des États-Unis et basé à New York. Ses installations au crochet, conçues en dialogue avec les espaces qu’elles investissent, émergent d’un enchevêtrement entre écologie, genre et iconographie queer. Son médium principal, le crochet, est un procédé qui consiste à torsader des fils ; il est répétitif et contemplatif. La méditation sous-tend cette pratique lente et minutieuse, dans laquelle Chandler inscrit directement le temps, le rituel et la dévotion. S’appuyant sur des cadres jungiens et l’étude comparée des religions, l’artiste tisse histoire de l’art, ésotérisme, culture populaire et éléments autobiographiques pour composer des hétérotopies orientées vers une forme de guérison collective
L’utilisation du crochet par Wells Chandler fait tout autant référence à la tradition de l’artisanat féministe des années 1970 qu’à l’étymologie du mot queer qui trouve, nous rappelle-t-il, son origine dans la racine indoeuropéenne –twerk (devenu twist, en anglais) signifiant « oblique » et « tordu ». Il explique que « cette racine est présente dans le processus technique du crochet qui implique l’élaboration de lignes de torsion des fils. » [1]
Ses œuvres constituent un corpus qui vise à déconstruire une histoire de l’art tronquée, une histoire de l’art qui fixe comme norme un génie universel masculin blanc hétérosexuel. Les théoriciennes des savoirs situés (Donna Haraway, Sandra Harding) nous alertent sur le concept d’universel qui a souvent servi à imposer le point de vue des dominants. Selon elles, il n’existe pas d’objectivité scientifique ; seule une perspective partielle promet une vision objective.
Ainsi, l’histoire de l’art comme récit de la culture occidentale universelle n’est rien d’autre qu’une allégorie des idéologies qui gouvernent les sociétés libérales et capitalistes, avec comme parangon le génie comme figure de la réussite individuelle. Celle d’un point de vue masculin généralisant et neutre qu’il nous faut abandonner au profit d’une multitude de points de vue situés dans des corps et de situations vécues ou subies, qui transforment les idéologies genrées, coloniales et capitalistes constituantes de l’histoire de l’art.
Extrait du texte de Pascal Lièvre, St Anthony’s fire, Galerie Eric Mouchet, Paris, 2019 (lire la suite)
[1] Entretien de l’auteur avec l’artiste, septembre 2019
Héritier de l’histoire de l’art féministe des années 1970, ses personnages tricotés au crochet et aux couleurs vives explorent la notion de Queer et les canons de l’histoire de l’art. Il a reçu son BFA à la Southern Methodist University (Dallas, TX) en 2007 et son MFA à l’Université de Yale en 2011 où il a reçu le prix Ralph Mayer.
Wells Chandler a récemment exposé en solo à Dialo Rosso (Panama City, Panama), au MOCA Tucson (Tucson, USA), à l’Union (Londres, Royaume-Uni), à la Soloway Gallery (Brooklyn, USA), à la Andrew Rafacz Gallery (Chicago, USA), à la Galerie Eric Mouchet (Paris, France). Parmi ses récentes expositions collectives, on peut citer Olympia (New York, NY), Dee Pre Art Gallery (Holland, MI), The Pensacola Museum of Art (FL), Leslie Lohman Museum of Art (NY), Choi and Lager (Cologne, DE), MOCA Detroit (MI) et Marinaro (NY). Plusieurs articles sont parus sur son travail dont écrit par Roxane Gay pour Art Forum, dans The New York Times, Hyperallergic, The Huffington Post, TimeOut, Modern Painters, Maake Magazine, Two Coats of Paint et AEQAI. Chandler a été nommé Teiger Mentor des arts à Cornell en 2023. Il a enseigné dans des universités publiques pendant plus d’une décennie. Ses œuvres figurent dans de nombreuses collections publiques et privées aux Etats-Unis et en Europe.
PLUS D’INFORMATIONS :
// Biographie
// Presse
// wellschandler.com
EXPOSITIONS :
// St. Anthony’s Fire (01/02-07/03/2020)
// Cruising Utopia (20/04-15/07/2023 | Bruxelles)
// Feminist Bird Club Presents: Luncheon on My Ass (13/05-22/07/2023 | Paris)
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