Après ANTE:IRL, prologue proposé au WONDER/Fortin en février 2021, Pierre Gaignard et Roy Köhnke présentent à la galerie Eric Mouchet HYPER CARBONE. L’exposition invite le public à pénétrer un temps suspendu sous les auspices du carbone, du charbon, de la combustion. Ici, la résurgence du feu compose les récits d’incendies, de régénérations – brûlis – et de rassemblements nocturnes.
Réminiscence de l’exposition manifeste des artistes surréalistes en 1938 où le feu crépitait au cœur d’un brasero éclairant un espace recouvert de poussière de charbon, HYPER CARBONE convoque les formes anthropomorphes de l’inconscient. Roy Köhnke et Pierre Gaignard réactualisent cet imaginaire collectif par la fiction scientifique, promesse d’un futur antidaté et d’un passé en recomposition permanente. En effet, si le duo avait un point commun, ce serait l’image combinée du fantôme et de l’hybride. Fantôme comme débris de mémoire, matérialisation du souvenir. Hybride comme synthèse anatomique, mise en pièces de l’intégrité physiologique.
Nourri d’une monumentale gamme d’images scannées et enregistrées, Pierre Gaignard emmagasine ce qui l’entoure. Monstrueuse base de données multimédia, ses œuvres sculpturales, vidéo et installatives constituent une cartographie mnésique et interconnectée : bâtiments détruits, individus évaporés ou moments fugitifs. Dé-réalisés par l’image virtuelle et la reconstruction 3D, les souvenirs de l’artistes se muent en présences fantomatiques. Témoins d’un temps suspendu, les spectres de Pierre Gaignard échappent ainsi à la décomposition fatale du vivant et de l’oubli.
Entre archive et hypertexte, Pierre Gaignard se joue du temps par la captation et la dématérialisation de la « réalité ». Il invente alors l’espace d’une narration technologique, une conscience « post-historique »[4] : un hors-temps dont les règles peuvent être subverties, inventées à l’infini. C’est le principe du gameplay (contrôle de l’Histoire propre au jeu vidéo), dont Gaignard se saisit, invitant le spectateur à se perdre dans les méandres de ses propres stigmates. Laissant éclore la temporalité virtuelle, l’artiste observe également les formes se composer au hasard des algorithmes – telles les plantes grimpantes de l’œuvre Vapormax Hedera Helix (2021). Sur ces images grandeur nature, des personnages impassibles nous font face, nous observent, en attente d’une rencontre impossible. Sur leurs corps diaphanes, le lierre numérique s’est mis à pousser de manière erratique. Phénoménologue hanté, Pierre Gaignard façonne des êtres-ruines figés dans un éternel présent : des fantômes…
Communiqué de Presse
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