Extrait du texte de Sarah Ihler-Meyer
« Le crépuscule du dieu Progrès ne cesse d’être annoncé sans jamais advenir. Un dieu porteur de rêves prométhéens, de maîtrise du temps et de l’espace, d’affranchissement à l’égard des limites spatio-temporelles notamment incarnés par des objets aussi ordinaires que la voiture et le téléphone. Rêves de vitesse et de communication sans frontière, ces artefacts sont aujourd’hui grevés par les désastres humains et écologiques auxquels leurs modes de production, leurs infrastructures et leurs émissions participent. Désactiver ces objets tout en maintenant leur charge symbolique, c’est l’opération à laquelle les soumet Tony Regazzoni.
Cette opération prend pour cadre les années 1970-1990 en France : trois décennies notamment marquées par deux chocs pétroliers, par les premières alertes relatives à l’effondrement des écosystèmes et l’instauration de politiques néolibérales. De quoi passer du rêve au cauchemar. Et pourtant, de manière concomitante et constitutive, la course au progrès rabattu sur le concept d’ «innovation» se perpétue en toute insouciance pour certain.e.s. En France elle prend notamment la forme d’investissements publics dans la recherche en matière de télécommunication, la construction de réseaux autoroutiers et des commandes publiques en vue d’une démocratisation de la culture, mais aussi dans la mise sur le marché des avancées technologiques de grandes firmes automobiles. Une période, donc, où les pouvoirs publics n’ont pas encore totalement cédé à la libre concurrence. »
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